De retour en Bundesliga après 7 ans passés en deuxième division, Hambourg comptera cette saison un nouveau Français dans son effectif. Après avoir terminé parmi les meilleurs buteurs de Bundesliga 2 la saison passée (13 buts) avec l’Eintracht Brunswick, Rayan Philippe a en effet convaincu le mythique club allemand de le recruter durant ce mercato pour 2,5 millions d’euros. Formé à Dijon puis passé par Toulon, Nancy et le Luxembourg, l’attaquant de 24 ans au parcours atypique est en train de se faire un nom en Allemagne. En attendant la France ? Rencontre.

Entretien réalisé par A.P.

Comment se passe la préparation ? Votre intégration ? L’allemand, vous maîtrisez ?

Ça se passe bien, on travaille dur, c’est intense, mais c’est important de bien travailler pendant la préparation. Tout se passe bien pour l’instant. J’ai trouvé un super groupe, on m’a super bien accueilli. En plus, j’ai la chance d’avoir trois Français avec moi (Jean-Luc Dompé, William Mikelbrencis, Aboubaka Soumahoro, ndlr), c’est encore plus facile pour l’adaptation. Pour ce qui est de l’allemand, je ne parle pas parfaitement, mais je comprends quasiment tout et j’essaie de pratiquer dès que je peux

Qu’est-ce que vous avez pensé de l’Olympique Lyonnais que vous avez joué en match amical il y a quelques jours (défaite 4-0) ?

Lyon, c’est le top top niveau, il y avait une différence entre eux et nous. Après, nous on sait que le coach voulait des matchs de préparation contre des grosses équipes pour bien travailler. Le plus important, c’est de progresser, ce n’est pas forcément le résultat, la préparation, ça ne te fait pas prendre de points. Tolisso, dans son secteur, dans son intelligence de jeu, c’est vraiment le top niveau. 

On imagine qu’avec votre saison passée à l’Eintracht Brunswick (13 buts et 6 assists en 2. Bundesliga), vous aviez plusieurs options cet été. Pourquoi avoir choisi Hambourg 

J’ai choisi Hambourg parce que c’est un club historique et parce que c’est le club qui m’a proposé le meilleur projet. J’ai vraiment senti l’envie de me faire venir, de progresser avec moi. Ils connaissaient très bien mes qualités, mais aussi les points sur lesquels je dois encore travailler pour continuer à progresser. Je pense que c’était le meilleur choix possible à ce moment-là.

Vos 3 buts et votre assist contre le HSV la saison passée, on vous en a reparlé au moment des négociations ?

Oui, on en a reparlé et ils m’ont dit qu’ils étaient contents parce que maintenant je n’allais plus être de l’autre côté !

“Hambourg, c’est vraiment une autre dimension”

Est-ce que vous avez déjà pu mesurer la dimension du club dans lequel vous avez signé ?

Oui, directement ! Dès que tu arrives au club, à l’entraînement, tous les jours il y a du monde qui vient voir les séances. Dès qu’on a un match, c’est rempli. Non, vraiment, les fans, c’est quelque chose. Même dans la rue, quand on sort, les gens nous souhaitent bonne chance. C’est vraiment une autre dimension. 

Vous sentez-vous prêt pour la Bundesliga ?

Évidemment, sinon je n’aurai pas fait le choix de venir à Hambourg. Si j’ai choisi de venir ici, c’est parce que je sais que je suis prêt pour jouer en Bundesliga. Et maintenant, je vais tout faire pour être le meilleur possible. 

Rayan Philippe, Hambourg, attaquant français
Crédits photo : IconSport

Jouer dans quelques semaines contre le Bayern Munich, le Borussia Dortmund ou le Bayer Leverkusen, qu’est-ce que ça vous inspire? 

Depuis que je suis gamin, c’est le genre de matches que je veux jouer, donc je suis impatient de jouer ces rencontres face à de grandes équipes, de grands joueurs, dans de grands stades, avec de l’enjeu, ce sera un kiff !

Avez-vous un objectif chiffré à atteindre en tête ?

Non, je ne me fixe pas forcément d’objectif pour l’instant. La Bundesliga, c’est nouveau, c’est un nouveau championnat même si ça reste l’Allemagne. Je veux simplement faire mon maximum. Si c’est 3 buts, ce sera 3 buts. Si c’est 20, ça sera 20. Je ne me fixe aucune limite. Je veux juste donner le maximum tous les jours et on verra ce qui se passera.

“Ma priorité était de rester ici par rapport à mes qualités et aux exemples de joueurs français qui réussissent en Bundesliga”

Est-ce que la réussite des attaquants français en Bundesliga ces dernières années (Hugo Ekitike, Randal Kolo Muani, Moussa Diaby, Alassane Pléa, Jean-Philippe Mateta, etc.) vous donne des idées et a pesé dans votre choix de rester en Allemagne cet été ?

Bien sûr, dans ma tête, j’ai réfléchi parce qu’il y avait des clubs d’autres championnats que l’Allemagne, mais j’avais dit à mon agent que ma priorité était de rester ici, parce que par rapport à mes qualités et aux exemples de joueurs français qui réussissent en Bundesliga, je sais que j’ai une chance de plus de faire quelque chose de bien. 

Rayan Philippe, Hambourg, attaquant français
Crédits photo : Imago

Il y a une ferveur populaire incroyable en Allemagne, même en deuxième division, ça change par rapport à la France, non ?

Quand j’ai eu l’opportunité de venir en deuxième division allemande, c’est l’une des raisons qui m’a poussé à dire oui, parce que je savais qu’il y avait des stades pleins, des stades de 50-60 000 spectateurs, même plus. Je savais que c’était une chance pour moi, de jouer avec cette pression dans des stades remplis. Alors que dans n’importe quelle autre deuxième division, à part en Angleterre, ce n’est pas plein comme ça. Hambourg et Schalke 04, ce sont les deux plus grosses ambiances que j’ai vécues en D2.

Quand on regarde votre parcours de l’extérieur, on a l’impression que vous vous êtes véritablement  trouvé en quittant la France. Vous confirmez ?

Oui, bien sûr. Après, c’est la vie, les concours de circonstances, qui ont fait que. Bien sûr qu’avoir quitté la France, ça m’a changé personnellement en tant qu’homme et en tant que joueur évidemment. 

“Je ne suis pas parti de la meilleure des manières à Dijon, mais je ne retiens que le positif “

Un mot sur votre expérience au Luxembourg, au Swift Hesperange, où vous avez brillé en 2022/23, avec 32 buts et 26 passes décisives en 30 matches de championnat, un titre de champion et un titre de meilleur buteur en poche !

Au tout début, ce n’était pas facile. C’est nouveau, il faut s’adapter, c’est un nouveau pays, une nouvelle façon de voir les choses. Ce n’était pas simple au niveau du club la première année. Mais après, on s’est mis au travail. La deuxième saison s’est mieux passée. Collectivement, avec le staff, tout était parfait. On a fait une saison incroyable, pas que moi, toute l’équipe. On a été champion, ce qui n’était jamais arrivé au club, on a fini le championnat avec plus de 100 buts marqués en 30 matches, c’était une saison incroyable. 

Avec le recul, que retenez-vous de votre passage à Dijon ?

Mes années à Dijon, c’est le début de tout, la base. J’ai fait mes années de formation là-bas. C’est là-bas que j’ai tout appris. J’ai eu la chance d’arriver jusqu’aux pros. Ce n’était que du positif. Après, les circonstances ont fait que. La saison où je pars en prêt à Nancy, le DFCO descend et beaucoup de gens quittent le club. Il y a beaucoup de changements, ceux qui arrivent veulent du renouveau et ne veulent plus forcément de toi. Je ne suis pas parti de la meilleure des manières mais je ne retiens que le positif de mes 5-6 ans là-bas, je ne vais pas retenir que les derniers mois qui se sont mal passés. 

Le retour de Nancy en Ligue 2, avez-vous pu le suivre de près ?

Je suis le foot français, je regarde surtout les clubs où je suis passé, c’est logique. Ils ont fait une sacrée saison, ils ont dominé largement le National. C’est bien pour eux qu’ils retrouvent la Ligue 2. Nancy, ce n’est pas un club qui doit être en National, je dirais même pas en Ligue 2 non plus. C’est un club important en France, je suis content pour eux. 

“Quand je me suis retrouvé à quitter Dijon pour aller au Luxembourg, tout le monde pensait que c’était fini”

Quels souvenirs gardez-vous de vos deux sélections en équipe de France U20 ? Quels sont les joueurs qui vous avaient particulièrement marqué pendant ces rassemblements ?

Ce sont les meilleurs moments de ma carrière, parce que jouer pour son pays, il n’y a rien de mieux. On joue au foot pour ça, pour représenter son pays. Porter le maillot de l’équipe de France, c’est plus qu’une fierté. Aujourd’hui, on a Aurélien Tchouaméni qui joue au Real Madrid, c’est celui qui a le mieux réussi. Moi, c’est Enzo Le Fée qui m’a marqué, c’est vraiment un très très bon joueur. 

Quelles sont vos inspirations en tant qu’attaquant et pourquoi ? 

J’ai deux sources d’inspiration. D’un côté, Cristiano Ronaldo pour le côté professionnalisme, travail, volonté. De l’autre, si on parle vraiment purement terrain, le joueur qui m’a toujours inspiré, c’est Karim Benzema. Pour moi, c’est l’attaquant le plus complet. Il est capable de marquer, de donner des passes décisives, de jouer dos au but, de dribbler, il sait tout faire. Quand je jouais n° 9, c’est sur lui que je prenais exemple. C’est lui le plus dangereux, parce qu’il sait tout faire. Quand tu défends sur lui, tu ne sais jamais où il peut aller. 

Votre père Alistair Philippe a joué au niveau National 2. Est-ce qu’il vous suit de près, vous donne des conseils d’attaquant ?

C’est mon père, donc il me donnera toujours des conseils, même quand j’aurai 40 ans ! Forcément, il me suit, il est content que je progresse bien. Quand je me suis retrouvé à quitter Dijon pour aller au Luxembourg, je pense que c’était un peu compliqué, tout le monde pensait que c’était fini. En ce moment, ça se passe mieux, donc c’est bien. Il est toujours à fond derrière moi. Dès qu’il a des choses à me dire, en bien ou en mal, il me les dit, et ça m’aide à avancer.

Entretien réalisé par A.P.