“On va jouer contre le Brésil 1970 là ou quoi ?” Des anciens joueurs de l’AJ Auxerre racontent Guy Roux pour son 87e anniversaire
Alors que Guy Roux fête ce samedi son 87e anniversaire, plusieurs anciens joueurs de l’AJ Auxerre racontent pour TopMercato leur expérience avec l’iconique entraîneur français de l’AJA, entre anecdotes au coin du feu et travail à l’entraînement.
Encore aujourd’hui, beaucoup de fans de foot abordent l’héritage de Guy Roux à travers des éléments hors terrain. Figure incontournable des Guignols de l’Info sur Canal+ qui jouait sur sa supposée avarice, l’entraîneur auxerrois a multiplié les apparitions à la télévision, en étant reçu comme un prince dans Tout le monde en parle avec Thierry Ardisson, en commentant les grandes compétitions internationales sur TF1 ou en multipliant les publicités.
Lorsque l’on évoque Guy Roux, l’entraîneur, surgissent alors des dizaines d’anecdotes, contées, transmises, répétées et à la fin toujours un peu déformées, mais tout autant crédibles. Parce que Guy Roux a déjà eu dix vies en une. Si l’on devait résumer en quelques mots les anecdotes les plus marquantes, on s’aventurerait près de Fidel Castro ou dans les boites de nuit auxerroises, en passant par la mobylette de Boli, un aéroport en URSS, un déguisement pour passer un barrage militaire, ou bien encore le relevé kilométrique des voitures de ses joueurs. Sans que l’on sache très bien finalement si les thèmes ne sortent pas plutôt de l’imaginaire de Ian Fleming, créateur de James Bond.
Les anecdotes de Guy Roux, un puits sans fond
À l’heure où les mots comme “gains marginaux” ont envahi les pensées des entraîneurs, cet état d’esprit du contrôle absolu et de la volonté de réduire la part d’incertitude était déjà très présente chez Guy Roux. Quitte à flirter avec l’esprit sportif.
“C’était un entraîneur à part, confirme Frank Verlaat, défenseur de l’AJA entre 1992 et 1995. C’était même plus qu’un entraîneur. Le club, c’était lui. Il s’occupait de la pelouse. Elle était parfaite au stade, ainsi que celles des terrains d’entraînement. On faisait toujours l’échauffement sur le terrain d’entraînement, à côté du stade les soirs de matches. Je me souviens que lors de notre superbe saison 1992/93 en coupes d’Europe (Auxerre est éliminé en demi-finale aux tirs au but par Dortmund, ndlr), on débute notre campagne par un match aller-retour contre le Lokomotiv Plodiv. En Bulgarie, on fait 2-2. Au retour, Guy Roux laisse passer l’échauffement et se dépêche de demander d’arroser le terrain juste avant le coup d’envoi. Résultat, les Bulgares avaient prévu des moulés, nous les vissés car on le savait. Ils ont glissé tout le début du match. Au bout de 10 minutes, on menait 3-0. On avait gagné ce match 7-1. Ça, c’était Guy Roux. Les gains marginaux de l’époque, c’était ça : ne rien laisser au hasard. Comme quand avant le match contre l’Ajax la même saison, il avait mis le chauffage à 40 dans le vestiaire adverse en prétextant que c’était en panne et qu’on ne pouvait pas baisser la température. Je suis Néerlandais et j’entendais Van Gaal et les joueurs de l’Ajax qui hurlaient dans les couloirs (rires). C’était marrant.”
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“C’était le 15e du classement ou le Brésil 1970 ?”
Frank Verlaat se souvient aussi des nombreux discours de Guy Roux : “Ce qui était marrant et parfois même incompréhensible pour nous, c’est qu’on sortait de la causerie d’avant-match en se disant : ‘mais punaise, on va jouer contre le Brésil 1970 là ou quoi (rires) ?’ À chaque fois, il trouvait des trucs pour amplifier le niveau de l’adversaire. On recevait le 15e du championnat de France, mais il te disait qu’un jour l’attaquant avait marqué un triplé, que le milieu était super fort, que lors du match d’avant ils auraient mérité de gagner 4-0 alors qu’ils avaient perdu 4-0, etc. Il était toujours dans la position du Petit Poucet et exagérait les qualités des adversaires. Et c’était toutes les semaines comme ça (rires). Mais c’était aussi un moyen pour nous obliger à rester en alerte. Et d’ailleurs avec lui, l’AJA a rarement perdu contre des adversaires plus faibles, y compris en coupes d’Europe.”
L’AJ Auxerre de Guy Roux s’est également rarement trompée sur le recrutement des joueurs. On trouvera bien un Ned Zelic ou un Pedro Reyes en route, mais si l’AJA a su devenir un club régulier pendant près de 20 ans en D1 avec Guy Roux, elle le doit autant à sa formation qu’à sa capacité à bien recruter et choisir les bons profils extérieurs.
Frank Verlaat a été l’un des plus beaux coups de l’AJA. Le défenseur néerlandais, école Ajax, rejoint l’AJA en provenance de Lausanne (Suisse). “En 1992, Auxerre est intéressé par ma venue, raconte Verlaat. Moi, je joue à Lausanne, en Suisse, et on me dit que Guy Roux souhaite me rencontrer. On est en plein Euro 92 en Suède et Guy Roux est sur place. Il m’invite – ma copine et moi – à venir en Suède. Il est venu nous chercher à l’aéroport et arrivé à l’hôtel, je me rends compte que c’est bourré de journalistes sportifs français. Et Guy Roux me dit : “ne t’inquiète pas, on dira que tu es un Suédois que je connais.” Comme j’étais grand et blond, c’était facile. Personne n’a su que j’étais un joueur que l’AJA était en passe de faire signer.” Guy Roux aimait rencontrer les joueurs, pour mieux les connaître. “C’est aussi pour ça qu’il s’est peu trompé”, renchérit l’ancien défenseur néerlandais de l’AJA.
Les mises au vert de l’AJA dans le Morvan
Guy Roux était un adepte des mises au vert dans le massif du Morvan, à quelques dizaines de kilomètres d’Auxerre. Pour les matches de Coupe d’Europe, c’était l’occasion de changer d’air, de faire tomber la pression et solidifier le groupe. Avec, parfois, des méthodes un peu étranges. “Dans le Morvan, on avait toujours notre halte sur un gros rocher en granit, où on devait s’asseoir devant lui, explique Philippe Violeau, milieu de terrain de l’AJA entre 1993 et 1997 puis de 2003 à 2006. Il parlait un petit peu du match de manière générale. C’était un petit préambule avant la causerie du jour de match. C’était peut-être de la superstition, mais nous, ça nous faisait un petit peu rigoler. On allait toujours à chaque mise au vert sur ce rocher.” Lionel Charbonnier, à l’AJA entre 1987 et 1998, confirme ce rituel : “Guy Roux disait que ça nous apportait des vibrations positives, et comme la première fois qu’on avait fait ça, on avait fait un grand match, on le refaisait car Guy Roux était superstitieux. Les anciens et les druides, notamment en Bretagne, faisaient beaucoup ça, et nous aussi (rires).”
Ces mises au vert dans le Morvan étaient l’occasion pour Guy Roux de faire ressortir son côté paternaliste. “On faisait des promenades après la sieste l’après-midi et on allait souvent voir un apiculteur, se remémore Charbonnier. Il était très gentil, on parlait de nature, de son miel, des arbres, des champignons. Il essayait de nous aérer l’esprit avant le match qui arrivait. Guy Roux achetait des pots de miel et aussi de la gelée royale. Il dépensait une fortune. Et le matin, dans la salle de restauration, on était tous attablés et le coach passait avec son sac rempli de gelée royale, sa petite cuillère et il nous donnait la becquée avec sa gelée. C’était obligatoire. On rigolait et on la prenait, et puis c’était très bon en plus. Il nous expliquait les bienfaits de ce produit et il passait derrière chacun d’entre nous à table, comme pourrait le faire un père ou une mère avec son fils. C’était vraiment son côté paternaliste, ça allait au-delà de la petite cuillère de gelée royale, c’était de la bienveillance envers nous, il prenait soin de nous. Ça faisait partie de son management.”
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Guy Roux était-il si rigide avec ses joueurs ?
Guy Roux le revendique lui-même, il a parfois utilisé “des méthodes militaires” pour surveiller ses joueurs : dormir dans le couloir d’un hôtel pour éviter la sortie des joueurs, vérifier le compteur kilométrique des joueurs pour voir leurs déplacements ou encore attacher la mobylette de Basile Boli, dans le but d’avoir une concentration maximale sur le football et un temps de repos respecté. Mais était-il constamment si rigide, génération après génération ? Pas si sûr !
“C’est vrai qu’avec Guy Roux, de l’extérieur, on a parfois tendance à penser qu’il était très strict, très rigoureux dans les règles, mais ce n’était pas toujours le cas, rétorque Corentin Martins, champion de France avec l’AJA en 1996 et désormais sélectionneur de Madagascar. Ce que j’en ai retenu dans mon travail de coach, c’est de garder un peu de souplesse dans la façon de diriger. Je mets des règles en place où je ne dois pas être tout le temps rigide, rigide. Je me rappelle des entraînements à Auxerre. Bon, on devait être à 09h30 dans le vestiaire. Des fois, ça débordait à 09h40 et il était pas si à cheval sur ça. L’idée est de garder une certaine rigueur mais savoir être souple quand nécessaire.”
Ce que confirme aussi Philippe Violeau qui a évolué avec la génération dorée de l’AJA au début des années 2000. “Il connaissait ses joueurs par coeur, retrace l’ancien milieu de terrain français. Et il adaptait son management en fonction des caractères et des personnalités de chacun. Pour tel joueur, il fallait lui rentrer dedans pour en tirer le maximum. Pour d’autres, il fallait une relation moins directe, savoir lâcher un peu de lest. C’est sûr que ça ne faisait pas toujours plaisir d’attendre Djibril sur le tarmac en plein soleil dans un avion à Branches (aéroport d’Auxerre, ndlr) parce qu’il avait 20 minutes de retard, mais on l’acceptait parce que c’était Djibril. Guy Roux ne disait absolument rien parce qu’il savait qu’il fallait préserver Djibril pour qu’il reste bien dans son état d’esprit avant les matches et qu’il ne déjoue pas. C’était l’une des grandes forces de Guy Roux, il savait retourner la situation à son avantage. Tu arrivais mécontent, tu discutais avec lui, tu repartais content.” Lionel Charbonnier résume la gestion du groupe par Guy Roux : “Si tu tires d’un côté, tu dois lâcher du lest de l’autre, si tu es trop rigide de tous les côtés, la ficelle casse.”
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Roux étudiait beaucoup ses joueurs, y compris à l’entraînement. “Guy Roux observait, il laissait beaucoup les ateliers et les exercices à son adjoint, Dominique Cuperly, explique Frank Verlaat. Lui observait, corrigeait, encourageait et surtout, il voyait tout. Il anticipait d’éventuels problèmes en détectant si un joueur était moins bien mentalement, pas en forme physiquement. Il avait ce don et aussi dans le recrutement. Il s’est rarement loupé. Il comprenait vite le joueur qu’il observait.”
L’entraîneur icaunais avait aussi vite compris que la vie personnelle influait sur les performances de ses joueurs. “Pour qu’un joueur soit bien sur le terrain, il attachait beaucoup d’importance à ce que le joueur soit bien dans sa vie personnelle, confirme Frédéric Jay, défenseur de l’AJA entre 1996 et 2003, et aujourd’hui entraîneur du Mâcon 71 (N3). Quand il a appris que ma femme était à l’école d’infirmière loin d’Auxerre, il m’a dit qu’il pouvait la faire venir à l’école d’Auxerre. Il faisait preuve de beaucoup de bienveillance.”
Olivier Kapo acquiesce : “Ça, c’était la force du coach. Il avait déjà la mentalité des grands clubs étrangers qui ont vite compris que pour être performant sur un terrain, un joueur devait être à l’aise et heureux dans sa vie personnelle. De savoir tout mettre en oeuvre pour qu’un joueur se sente bien sur le terrain.”
La répétition des gestes si chère à Guy Roux
Tous les joueurs de l’AJA ont évoqué pour TopMercato cette répétition des gestes si chère aux yeux de leur entraîneur. “Il croyait beaucoup en la répétition des gestes techniques, confirme Verlaat. Je me souviens des phases d’utilisation de nos ailiers : on répétait beaucoup de fois la qualité des centres et le positionnement dans la surface : le 9 faisait un appel au premier poteau, on avait un milieu qui se projetait plein axe et l’ailier à l’opposé venait fermer au second poteau. On l’a beaucoup répété. Parfois même sans aucune intensité. Simplement, bien exécuter les gestes pour le passeur et la finition pour les receveurs. On avait une qualité de centre incroyable notamment avec Pascal Vahirua. On était aussi forts sur coups de pied arrêtés parce que les ballons étaient parfaits. Ce n’était pas des ballons qui montaient hyper haut dans le ciel et redescendait avec limite de la neige dessus. Non, c’était tendu et dans les bonnes zones. Et ça on le répétait aussi.”
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Les progrès ne tardent pas à se faire sentir pour Philippe Violeau : “J’ai beaucoup progressé dans la technique générale. J’arrivais (en 1993) d’un centre de formation récemment créé, à Niort, où on n’avait pas du tout les mêmes méthodes de travail. Je suis arrivé avec des lacunes et le travail au quotidien de répétition des gestes a été très bénéfique, même si sur l’instant on trouvait ça rébarbatif. Si on avait une telle qualité technique à cette époque-là, c’est aussi parce qu’on la travaillait beaucoup. C’est un peu comme le joueur de tennis qui se met à la volée et en enchaîne pendant des dizaines de minutes. Nous c’était pareil, le contrôle, la passe, les centres, le jeu de tête.”
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Un 11 titulaire inchangé et l’apprentissage de la patience
Dans une période où nombre d’acteurs réclament une nouvelle organisation du calendrier des compétitions, Guy Roux pourrait-il garder son fonctionnement d’autrefois ? Avec lui, le turn-over n’était ni un problème, ni une solution, mais plutôt un concept flou. Habitué à aligner son onze titulaire match après match, y compris lors des semaines européennes, l’ancien technicien de l’AJA n’était pas du genre à bouleverser ses compositions. Pour les remplaçants, il fallait bien entendu s’en accommoder et être patient.
“Avec Guy Roux j’ai appris la patience, explique Lionel Charbonnier. Je pense notamment que ma sélection en 1998 pour le Mondial s’explique par cette patience. Il m’a appris à être patient tout en la fermant. La patience ce n’est pas simplement attendre, c’est comprendre ce que tu dois faire pendant ce temps, comment tu te comportes, comment tu te places dans le groupe. Pendant mon année de Bac, j’étais au Lycée Fourier, et il me faisait descendre au terrain d’entraînement. Je me changeais dans le vestiaire et je passais l’entraînement derrière Joël Bats, notre gardien titulaire, à observer tout ce qu’il faisait. Je descendais exprès juste pour observer Joël. Guy Roux était plein de symboles. Donc c’était important pour lui que je vienne, que je sois dans le vestiaire, que je me mette en tenue même sans faire d’exercice parce que ça voulait dire, pour Guy Roux, que je faisais partie du groupe. J’apprenais la patience tout en observant. Et tu progresses en observant. J’ai énormément appris en regardant Joël. J’ai appris aussi à fermer ma bouche. Quand Bruno (Martini, ndlr), revient de son prêt à Nancy en 1985, c’est lui qui est titulaire. Ça voulait dire que je n’étais pas encore prêt, ce n’était pas encore pour moi. Je suis longtemps resté doublure de Bruno et c’était normal, c’était le meilleur gardien français à ce moment là. J’ai su reconnaître qu’il était meilleur. Mais on m’a aidé à comprendre ça. Au-delà de la confiance qu’il me donnait, des progrès que j’ai pu faire, cette patience a été fondamentale. Et en 1998, Philippe Bergeroo (entraîneur des gardiens de l’équipe de France) et Aimé Jacquet savaient que je pouvais être troisième gardien, être performant à l’entraînement et rester à ma place. Le savoir être remplaçant.”
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Entraîner, certes, mais aussi éduquer les jeunes joueurs
L’éleveur de champions, ainsi dépeint par Les Guignols de l’Info, était autant un entraîneur qu’un éducateur pour les jeunes joueurs de la Pyramide, le centre de formation de l’AJA. Guy Roux a toujours attaché de l’importance à la construction individuelle et personnelle, comme adolescent et adulte, de chacun de ses jeunes joueurs. “Quand il passait au centre de formation, il fallait que le lit soit parfait, l’armoire rangée, la poubelle vidée, se souvient Olivier Kapo. Quand on partait en cours, il fallait qu’on range bien, sinon on avait une amende (30 francs pour la poubelle, 50 francs pour le lit) et il venait nous voir le midi et il me disait : ‘Oliv, il y a un grand vent qui est passé dans ta chambre, tout est renversé, il va falloir ranger.’ Si ce n’était pas rangé, il vidait la poubelle par terre. Ça nous éduquait. Ça m’est resté. Encore aujourd’hui, chez moi, c’est rangé, mes enfants savent que le lit doit être fait, etc. Il nous a beaucoup aidé.”
Le passage du centre de formation à l’effectif professionnel était une étape importante. C’était une vraie passerelle à Auxerre. Mais elle ne se faisait pas non sans quelques difficultés. “En février 1999, on joue à Amiens en Coupe de la Ligue et on gagne, ajoute Kapo. Je joue 20 minutes et j’étais encore au centre de formation. Le lendemain, j’arrive dans le vestiaire et je n’avais pas nettoyé mes chaussures. Il y avait de la terre et de l’herbe. Guy Roux m’a pris par l’oreille et m’a emmené devant Bernard Diomède qui avait nettoyé ses chaussures et était déjà en train de les cirer. Et là tu comprends que le milieu professionnel, ce n’est pas de la rigolade. Ce sont des détails. Le matériel, on le respecte. Il m’a vraiment tiré l’oreille hein (rires).”
L’AJ Auxerre de Guy Roux : pas seulement des contre-attaques !
Dans l’imaginaire collectif, l’AJ Auxerre de Guy Roux n’était basée que sur un 4-3-3 et des contre-attaques. Les principaux exécutants sur le terrain de la tactique mise en place par Guy Roux nuancent beaucoup cette idée reçue. “On excellait dans les transitions parce que nos ailiers étaient rapides, mais en revanche, avec les joueurs techniques qu’on avait, on savait aussi garder le ballon, faire du jeu de position, et on avait rien à envoyer aux plus grosses écuries du championnat de France sur l’aspect technique, nous éclaire Philippe Violeau. Au milieu, on a eu des Martins, Dutuel, Lamouchi, Saïb, que des grands techniciens. Ça serait frustrant de dire qu’on ne jouait qu’en contre ou qu’on balançait des longs ballons devant. On avait des circuits de passe dans le jeu au sol, des connexions entre des défenseurs qui excellaient à la relance comme Verlaat, Blanc ou Silvestre, et nos milieux techniques.”
Même son de cloche chez Frank Verlaat : “Guy Roux m’utilisait beaucoup dans l’élaboration du jeu. J’avais cette qualité de passe. Avec Coco Martins, tu pouvais jouer dans les pieds les yeux fermés. Avec Daniel Dutuel et Raphaël Guerreiro aussi. Puis Moussa Saïb. On avait une qualité technique qui nous permettait de pouvoir dominer des matches.”
Il est impossible de résumer facilement l’aventure de l’AJA avec Guy Roux. L’AJA avait son guide : un guide plein de bon sens et d’idées. Vainqueur de 4 coupes de France et d’un championnat, demi-finaliste de la Coupe de l’UEFA et quart de finaliste de la Ligue des champions, Guy Roux a posé un club et une ville sur la carte du football européen. L’héritage est énorme et il se propage encore dans les travées de l’Abbé Deschamps.
(Avec JC, RL)