Formé en partie au Paris Saint-Germain, Jordan Gele a connu un parcours atypique qui l'a vu passer notamment par la réserve de Nantes et la Suisse, avant de rejoindre la Roumanie, où il a signé au FCSB (ex-Steaua Bucarest) en février. Pas qualifié pour affronter l'Olympique Lyonnais en 8es de finale de la Ligue Europa, l'attaquant franco-congolais de 32 ans s'est confié en exclusivité pour Top Mercato avant la manche retour, qui verra son équipe tenter de renverser la vapeur au Groupama Stadium après sa défaite 3-1 à domicile à l'aller.
Entretien réalisé par A.P.
Jordan, quel est votre regard sur le 8e de finale aller de Ligue Europa entre votre club, le FCSB, et l’Olympique Lyonnais (1-3) ?
C’est frustrant, parce qu’au regard de notre prestation, on aurait dû obtenir un bien meilleur résultat, au moins le match nul. Et là, tu termines avec une défaite par deux buts d’écart, c’est un peu dur, surtout à domicile…
Y a-t-il des joueurs qui vous ont particulièrement impressionné chez les Gones ?
Je suis bien le championnat de France, alors je les connaissais déjà bien pour la plupart. Après, Lucas Perri a été vraiment pas mal. Leurs idées de jeu collectivement, leur manière de construire, l’animation avec le ballon, ils étaient vraiment pas mal sur ces points.
“Les jeux ne sont pas faits contre l'OL”
Dans quel état d’esprit était le groupe au sortir de la rencontre en vue du retour ?
On va partir là-bas pour tout donner au match retour. Il y a de la déception, mais il reste encore un match et les jeux ne sont pas faits. On a encore toutes nos chances sur le match retour, même si c’est vrai que deux buts d’écart, c’est embêtant. Mais un match, ça dure 90 minutes, on va tout donner en espérant un résultat positif pour nous.

Aviez-vous suivi toute la semaine agitée de l’OL, autour de la lourde suspension de Paulo Fonseca ?
Entre joueurs, on a parlé de ce qui s’est passé à l’OL. Ça a quand même fait le tour du monde, même ici en Roumanie, on a beaucoup parlé de cet épisode Fonseca avec l’arbitrage et de sa sanction. On était surtout concentré sur le match, on a analysé leurs forces et leurs failles, mais on en a quand même parlé.
Vous étiez dans les tribunes jeudi soir (arrivé le 10 février 2025 en fin de mercato, Jordan Gele n’a pas pu être inscrit sur la liste du FCSB pour la Ligue Europa, envoyée le 6 février 2025 à l’UEFA). L’ambiance était impressionnante, avec 55 000 spectateurs à l’Arena Nationala. Est-ce que c’est comme ça pour tous vos matches ?
Pour les grosses soirées européennes, ça se passe très souvent comme ça. En Roumanie, tu as 5-6 équipes qui luttent pour le titre et c’est aussi comme ça contre elles. Pour avoir vécu les deux derniers derbies (contre le Dinamo Bucarest et le Rapid Bucarest), il n’y avait pas 55 000 personnes mais bien 30-35 000 spectateurs et c’était impressionnant. L’ambiance est bonne. Contre le PAOK au tour précédent, c’était aussi très impressionnant, une ambiance extraordinaire. Ça donnait vraiment envie de jouer.

“Le transfert s’est concrétisé dans la dernière heure du mercato”
Comment l’adaptation au FCSB se passe-t-elle pour vous ?
Franchement, ça se passe très bien. Je suis venu sur la pointe des pieds. Le transfert s’est concrétisé dans la dernière heure du mercato. Tout le monde m’a bien accueilli. J’ai tout de suite compris que je n’étais pas arrivé n’importe où, que j’étais dans le meilleur club de Roumanie. Maintenant, on se plie aux exigences et on travaille.
Racontez-nous votre transfert. Comment réagissez-vous quand vous apprenez que le FCSB vous veut ?
Une semaine avant la fin du mercato, ça parlait déjà pas mal, pas forcément avec le FCSB mais avec d’autres équipes du top 6 vu mes prestations en première partie de saison avec Unirea Slobozia (5 buts et 4 passes décisives en Superliga). Le dernier week-end avant la fin du mercato, je ne peux pas jouer car je suis suspendu et le coach de Slobozia, Adrian Mihalcea, vient me parler. Il me dit que le club ne va pas pouvoir me retenir trop longtemps, que mon nom circulait un peu à gauche à droite. Il me dit qu’il y aura peut-être des offres sur la table que le club ne pourra pas refuser. Il m’a expliqué que c’était compliqué pour le club de me garder et qu’il y avait le FCSB sur les rangs. Il m’a dit que c’était une bonne opportunité pour moi, il m’a donné son avis en tant qu’ancien joueur professionnel (ex-international roumain passé en Italie, ndlr) et il m’a demandé ce que j’en pensais.

J’étais directement emballé, on parle du FCSB quand même. Pendant le week-end, personnellement, je n’ai pas eu de nouvelles, mais mon nom était cité partout dans les médias. Et le lundi 10 février, tout s’est accéléré. À 16h, le téléphone d’Ousmane Viera, mon agent, commence à sonner. Les offres tombent. Au début, mon club refusait parce qu’il devait me trouver un remplaçant dans un délai très court. J’ai dû un peu forcer la main et faire comprendre à mon club que c’était une trop grosse opportunité pour que je la laisse passer, surtout à mon âge. Je voulais absolument y aller. Unirea Slobozia n’était pas trop d’accord au début mais, après, le FCSB est venu avec une offre convaincante et comme il ne me restait que quatre mois de contrat, ils ont fini par céder et me laisser partir. Je crois que j’ai signé aux alentours de 23h.
Trois matches, un but et une passe décisive : comment jugez-vous vos débuts avec votre nouveau club ?
Dans l’ensemble, je dirai que ce sont de bons débuts. Je viens d’arriver. Il y a beaucoup d’attentes. Beaucoup se demandent si je vais réussir à avoir de la continuité sur ce que je faisais en première partie de saison. Je pense que je me suis adapté assez rapidement. Ce n’est que le début, mais je suis content, surtout pour le premier but, de la victoire, dans le derby contre le Dinamo (2-1, 28e journée de Superliga). Pour ma première à domicile sous le maillot du FCSB, c’était important.
“Je suis entré dans une autre dimension”
Parlez-nous de votre nouveau quotidien, vos nouveaux partenaires, votre nouvelle réalité, votre nouvelle ville.
J’avoue que je suis entré dans une autre dimension. À Unirea Slobozia, j’étais dans un club promu en première division, avec très peu de moyens, des conditions très modestes, mais qui m’a permis de me montrer. Là, passer chez le champion en titre, un club mythique, qui a un passé victorieux en Ligue des Champions, c’est une autre atmosphère. Mes nouveaux coéquipiers m’ont félicité à mon arrivée et m’ont vite expliqué qu’on devait gagner tous les week-ends au FCSB. C’est la plus grande difficulté. Il faut vraiment performer tous les week-ends, il faut s’adapter à ça. Ils m’ont fait comprendre qu’avec le travail, ça allait aller, parce qu’autour de toi il y a des joueurs de qualité et ça va suivre. Mais au niveau de l’ambiance, il y a beaucoup d’internationaux, alors qu’à Unirea Slobozia, il n’y avait que deux Espoirs je crois.

Là, il y a beaucoup d’internationaux, ça parle de la prochaine CAN, de Coupe du monde, du dernier Euro, c’est autre chose… Les conversations dans le vestiaire ne sont plus du tout les mêmes. J’arrive sur la pointe des pieds, mais aussi avec des ambitions. Je veux montrer ce que je sais faire et continuer à travailler. Tout ça me motive. C’est bien d’avoir cette exigence-là. Je prends ça bien, ça me motive.
Vous avez signé au FCSB jusqu’en juin 2026. Quelles sont vos envies et vos ambitions pour l’avenir ?
Je veux essayer d’aller le plus haut possible. Après, je suis Français mais aussi d’origine congolaise. Je suis dans un club qui peut peut-être me permettre d’avoir une opportunité en sélection. Après, c’est à moi de montrer sur le terrain. Avec le club, on est premier au classement et conserver notre titre est l’objectif n° 1. Si on gagne encore le titre cette saison, il y aura les tours préliminaires de Ligue des Champions. Il faudra les jouer et les gagner pour pourquoi pas la disputer après. La saison passée, ils ont perdu au dernier tour préliminaire. C’est encore dans les têtes et tout le monde veut la jouer. Ce serait bien pour moi. Je veux jouer l’Europe. Quand j’ai vu ce que ça donnait en Ligue Europa. Je n’ai qu’une envie, c’est de vivre ça, mais sur le terrain, en jouant cette fois.
“Je suis très vite passé au Paris SG”
Vous êtes passé par le PSG, Clairefontaine et le Racing dans votre jeunesse, racontez-nous vos débuts de footballeur.
J’étais à Houilles, ma ville natale. Je suis très vite passé au Paris SG. Pierre Reynaud et Jérôme Klein m’ont recruté très tôt. Il y avait Gianelli Imbula, Youssouf Sabaly, etc. Après, je suis passé à l’INF Clairefontaine, ce qui n’était pas très bien vu à l’époque car j’étais au PSG en préformation. Je l’ai fait quand même. S’en sont suivies plusieurs mauvaises décisions de ma part. À Clairefontaine, dans ma génération, il y avait Willy Boly, Julien Janvier, Yanis Salibur, Nicolas Isimat-Mirin, Sébastien Corchia, etc. Ça ne s’est pas très bien passé pour moi là-bas.
Je suis revenu en région parisienne au Racing. De là, j’ai fait plusieurs années au Racing. J’ai arrêté un temps le foot. J’ai repris à Boulogne-sur-Mer, j’ai bougé de CFA en CFA (équivalent du National 2 à l’époque). J’ai signé ensuite au FC Nantes, où j’ai signé mon premier contrat professionnel. Je suis parti en Suisse par la suite, où j’ai évolué en deuxième et troisième division, puis en Roumanie, où j’ai connu la deuxième division avant d’être en première division aujourd’hui.
Avez-vous des modèles, des références à votre poste ?
Depuis petit, je regarde les attaquants. J’aimais bien Didier Drogba. Aujourd’hui, par rapport à mon style de jeu, j’aime bien Harry Kane, Edin Dzeko, Karim Benzema. Je regarde ce genre d’attaquants, des buteurs qui savent aussi faire jouer l’équipe, ce qui est aussi mon profil.